Célébration de saint François Xavier

Aujourd’hui comme hier cependant, nul ne peut s’auto-proclamer messager de l’Évangile ! Car, « comment proclamer sans être envoyé ? ». En écho à cette question de la lettre aux Romains, l’évangile de ce jour donne à entendre l’envoi en mission des apôtres par le Ressuscité : « Allez ! De toutes les nations, faites des disciples ». Au cœur des Exercices Spirituels, dans la méditation sur les deux étendards, Ignace invite d’ailleurs à « considérer comment le Seigneur du monde entier choisit un grand nombre de personnes, apôtres, disciples, etc., et les envoie dans le monde entier répandre sa sainte doctrine parmi les personnes de tout état et de toute condition. » Si nous avons le bonheur d’être envoyés, d’être ces messagers dont les pas sont beaux parce que porteurs de la Bonne Nouvelle, il ne faudrait surtout pas oublier que nous sommes avant tout les heureux bénéficiaires d’une annonce. Personnellement, je suis toujours profondément bouleversée par le fait que depuis plus de 2 000 ans, c’est une chaîne ininterrompue de messagers qui nous donne d’être rassemblés dans cette église au nom du Christ et d’être, à notre tour, des envoyés. Aujourd’hui, la Bonne Nouvelle a besoin des hommes et des femmes que nous sommes pour continuer à se frayer un chemin dans le temps et dans l’espace ; elle a besoin de notre cœur pour être entendue et accueillie ; elle a besoin de notre foi pour être vivante ; elle a besoin de notre bouche et de notre vie pour être proclamée.

Aujourd’hui comme hier, nous savons qu’il y a bien des obstacles et bien des résistances, en nous et autour de nous, à cette annonce. Les crises multiples et variées qui agitent nos sociétés et notre monde, les temps si douloureux que nous traversons actuellement en Eglise, ont de quoi nous faire perdre pied et perdre cœur ; ils ont de quoi nous interroger, peut-être même nous faire douter que l’annonce de la Bonne Nouvelle est encore possible, que l’Évangile a encore une chance d’être entendu, accueilli, cru, alors que tant d’événements semblent le mettre en échec.

Pourtant, avoir entendu et accueilli cette Parole en nos vies, fait de nous ses dépositaires et convoque notre responsabilité à continuer à y croire malgré tout, à l’annoncer malgré tout, pas seulement par la prédication ou dans une annonce explicite, mais aussi et avant tout par un style de vie, par une manière d’être au monde, de se mettre au service, d’agir, d’entrer en relation et de vivre, qui fassent signe et contribuent à dire et révéler des facettes du visage du Christ.

Quoi qu’il en soit, ces temps troubles nous provoquent, plus que jamais, à ne pas oublier que le Christ nous précède partout et qu’il est déjà présent, certes parfois caché, mais agissant par son Esprit dans les cœurs. Car l’annonce ne consiste jamais à apporter le Christ de l’extérieur ; elle contribue seulement à le révéler déjà présent au plus intime du cœur des personnes, déjà présent, déjà là, bien que parfois voilé, caché, inaperçu. D’ailleurs, la première lecture nous le rappelait : « Tout près de toi est la Parole, elle est dans ta bouche et dans ton cœur. » C’est pourquoi, aujourd’hui comme hier, il nous faut avant tout apprendre à lire et à déchiffrer les signes de la présence du Ressuscité dans les cœurs, de cette présence qui préside à toute annonce. Dans ce labeur qui se transforme parfois en travail d’enfantement, le discernement est là pour nous aider à affûter notre regard, notre écoute, notre sentir : Christ déjà là, déjà présent bien que parfois voilé, caché.

Réunis ce soir en famille ignatienne au cœur de l’année où nous fêtons le 400ème anniversaire de la canonisation d’Ignace et de François-Xavier, encore certainement remplis de la joie du grand rassemblement de Marseille que plusieurs d’entre nous ont eu la chance de vivre, unissons nos cœurs dans une même action de grâces, celle d’être des messagers de l’Évangile, disciples et apôtres du Christ, grâce à d’autres ; unissons nos vies dans une même offrande pour qu’elles soient prises dans celle du Fils bien aimé et qu’elles deviennent, en Lui, vies livrées,  pain à partager : « Prends Seigneur, et reçois… c’est toi qui me l’as donné, à toi Seigneur, je le rends… disposes-en selon ton entière volonté. »

Véronique Fabre, sœur du Cénacle, communauté de Montmartre.

Pour écouter le Commentaire de la Parole, cliquez ici : Commentaire

Pour revoir l’intégralité de la messe, cliquez ici : Fête de saint François Xavier

Les textes de la Parole de Dieu ( Rm 10, 8-17  / Ps 85, 1-3, 7-8, 9-10 / Mt 28, 16-20 ) sont ci-dessous :